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BOYZ II MEN - It's so hard to say goodbye to yesterday (1991)

  • Photo du rédacteur: Tonton Touane
    Tonton Touane
  • 29 juil. 2019
  • 5 min de lecture

(ou la fois où un quatuor à cordes a sauvé la Motown)


Il doit bien y avoir une demi-éternité que je n'ai pas écouté Boyz II Men, et pourtant, je me suis surpris à fredonner l'air de It's so hard to say goodbye to yesterday, qui m'a irrémédiablement ramené à ma pré-adolescence. Et cela pas plus tard qu'avant-hier. Comprenez par là que la trace laissée par ce groupe vocal est très profonde. La dernière fois que j'ai eu la même impression, c'était avec Funky Boss de Beastie Boys que j'ai eu en boucle dans la caboche tout une après midi...

J'ai donc réfléchi à la raison pour laquelle cette chanson magnifique me revient, alors que je croule sous les Debussy, Brahms et Bach d'un côté et les B.O de Game of Thrones ou Westworld de l'autre, sans oublier une dose quotidienne de rock et pop, histoire de donner une éducation vaste à mon petit bout de 15 mois. La réponse la plus plausible tient en deux mots: l'Arme Fatale. Le troisième épisode, en l’occurrence, puisque ce titre illustre la scène de l'enterrement d'un gamin victime de la guerre des gangs. Je me souviens avoir eu le cœur serré car le thème était parfait pour l'occasion. Un instant de nostalgie, un regret non formulé, et puis l'air de la chanson me claque le cervelet: Il est parfois si dur de dire adieu à hier...


Du coup, je me replonge dans l'album qui m'a fait découvrir le gang de gentils chanteurs pas du tout violents de Philadelphie, sorti à l'origine en 1991, mais qui fut ré-édité en 93 et c'est cette version-là que mon frère acheta une blinde au Club Dial en 94 en même temps que leur deuxième album simplement intitulé II. Je sais, c'est très précis, mais je possède une mémoire sélective parfois handicapante. Le retour sur la platine n'est pas si désagréable que prévu. Les harmonies vocale de Shawn Stockman, Wanya et Nathan Morris, sans oublier la basse Michael McCary (qui quittera la formation en 2003 pour raisons de santé) sont proprement incroyables (quoique bizarrement mixées parfois, comme sur Lonely heart). Ce genre de formation vocale a connu un énorme succès dans les années 20 et 30 avec les Boswell Sisters, les Mills Brothers puis évidemment les Andrew Sisters, qui explosèrent dès 1937 et firent le tour des bases militaires américaines durant la deuxième guerre mondiale. Du reste, les pouliches avaient une sacrée dégaine en uniforme... Ces groupes vocaux proches du jazz tirent eux-mêmes une origine dans le gospel chanté à l'église et les negro spirituals, ces chants rythmés scandés dans les champs par les esclaves pour donner de l'entrain au travail. La naissance du blues et du jazz s'est naturellement produite ici, sans autres instruments que la voix et l'âme qui cherchait à s'élever au-dessus du corps meurtri par la tâche.

Dans les années 60 et 70, la Motown va devenir grand pourvoyeur de «voix» et des formations comme the Four Tops, Diana Ross and the Supremes ainsi que the Jackson Five vont creuser le sillon du chant harmonique avec cette couleur blues/funky. Les années 90 marquant une période de revival 60s (souvenez-vous des jeans pattes d'eph' et autres chemises à carreaux que Neil Young aurait pu donner à Kurt Cobain...), il était tout naturel que le rythm&blues ait sa propre redéfinition. Mais le seul reproche que je pourrais faire à ce premier opus est le côté «âgé» de la musique. Certaines instrus ont si mal vieilli! Je sais bien que ce disque a trente ans bientôt, mais fichtre, les synthés et boîtes à rythmes ont pris un sérieux coup dans les dents... La prod de Michael Bivins aurait pu être mille fois plus léchée, soulignée par une vraie batterie, des pianos et guitares acoustiques, on n'aurait pas à souffrir de cette purge. Les morceaux sont pas mal, attention, ils sont aux standards de l'époque, mais l'album manque d'homogénéité. Motownphilly est un moment phare de la street culture, tandis que This is my heart est une guimauve déjà mâchée et digérée par un centre de gériatrie au complet. À moins d'avoir une histoire liée à cette chanson, il est dur de la retenir pour un awesome mix perso...

Reste ce petit bout d'anthologie, porté par quatre voix splendides. It's so hard to say goodbye to yesterday est un putain de monument qui a cette capacité rare de voyager à travers le temps. À mon entrée au collège, les Boyz II Men étaient au top du mouvement New Jack Swing, mélange de funk, de gospel et de Hip Hop, bientôt copiés par des monstres de foire hexagonaux comme Tribal Jam ou Poetic Lover... à chaque génération ses héros. En fouillant les méandres du net, je découvre qu''il s'agit d'une reprise d'un titre de 1975, créé par Freddie Perren et Christine Yaran, un couple d'artistes et producteurs de la Motown qui créèrent une B.O pour Cooley High, un film de Blaxploitation qui raconte les aventures de deux potes de lycée en dernière année qui tentent de vivre leurs expériences entre ciné, gonzesses et guerre des gangs. Un succès qui rapporta 13 millions de dollars pour un budget d'à peine 750 mille billets. La chanson était alors interprétés par Georges Curtis Cameron, un ancien Marine qui après avoir combattu au Vietnam a rejoint la Motown au sein du groupe The Spinners avant d'être produit en solo. Ce mec a même rejoint les mythiques Temptations dans les années 2003 à 2007, il était capable d'imiter n'importe quel artiste et donc de remplacer au pied levé un chanteur défectueux. Pratique, non? Bref, les paroles traitent d'un sujet lourd, qui semble parler à chacun de nous, la perte d'un être cher.

Une séparation, un décès, la fin d'une formation ou d'une colonie de vacances, tous les cas de figure peuvent provoquer ce vide qu'il faut exprimer, et quoi de mieux qu'une chanson? «Les bons moments qui nous ont fait rire prennent le dessus sur les mauvais (…) Je croyais que nous serions ensemble pour l'éternité, mais l'éternité a explosé en plein vol. Il est si difficile de dire au revoir à hier». Ces mots peuvent résonner partout dans le monde, ils sont universels et touchent le cœur. C'est pour cette raison qu'un tas d'artistes se mesurent régulièrement à cette chanson devenue un classique, que ce soit sur disque, comme Jason Mraz en 2014, ou la chanteuse Angela Aki avec une version en japonais. En concert, Usher rendra hommage à la chanteuse Aaliyah disparue en 2001, ainsi que le rappeur R.Kelly en 2012, en mémoire d'un ami basketteur assassiné en 84. Du coup, on se retrouve presque dans l'Arme Fatale, lors des funérailles du copain de Nick, le fils de Roger Murtaugh. Et voici que je retombe sur le début de ma chronique. Ouf! J'ai bien failli me perdre. Boyz II Men est un super groupe vocal qui a su cristallisé cette union entre la culture de rue et l'harmonie héritée des décennies passées, le tout grâce à un titre écrit dans le années 70. Ils répéteront l'exploit en 94 sur l'album II avec une version a capella de Yesterday des Beatles. Un régal à se mettre dans les étagères à mégots! Et depuis le temps où j'ai entendu pour la première fois It's so hard, je ne peux m'empêcher de me dire qu'il est plus facile de regarder en arrière que d'affronter l'avenir. Le passé, on peut toujours le rendre plus beau, alors que le futur est incertain et nous effraie. La perte d'une personne ou la fin d'une époque est toujours triste car nous quittons un certain confort, une habitude. Vivre après ça est compliqué à envisager pendant un temps, mais la vie est telle qu'un nouvel événement vient bousculer ce chagrin et le sourire revient irrémédiablement sur le visage.

En résumé: N'oublie pas d'où tu viens, souviens-toi des gens qui t'ont amené là mais garde un œil au devant car l'aventure est là, sous tes pieds. À plus, les gens.

 
 
 

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