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RANCID - ...And out come the wolves (1995)

  • Photo du rédacteur: Tonton Touane
    Tonton Touane
  • 7 févr. 2021
  • 5 min de lecture

(le fond ET la forme en 50 minutes)


Ô toi, qui confines sagement dans ton canapé, une vapote à la main et Netflix en bandoulière, ou bien qui trottes fiévreusement dans un supermarché blindé de tant de tes semblables qui t'exaspèrent, à force de se donner le mot pour aller chercher au même moment cette putain de boîte de sauce tomate qui manque pour la bolognaise de ce midi... Ô toi, disais-je, rappelle-toi ces moments de grâce éternelle, où nous levions le poing en l'air dans une ambiance éthylique et brumeuse pour scander les refrains de notre génération. Souviens-toi, c'était avant cette, cette chose.

Nous avions treize, dix-huit, vingt-cinq ans, et personne dans cette salle n'était là pour nous rappeler notre manque d'ambition professionnelle, notre look socialement agressif, personne pour souligner notre tendance à tout consommer avec excès. Dans ce lieu de retrouvailles (et donc de perdition, comme disent les adultes), tu entres, tu aimes, tu cries, tu ingurgites, tu ris, tu craches, tu zones et si tu tombes, quelqu'un te relève. C'est la règle tacite du punk-rocker.

Je ne suis pas un punk, mais je vis en punk. Comprends-moi bien, mon quotidien ne ressemble pas à une chanson des Ramones ou de Minor Threat. Je ne vis pas en squat et les flics ne s'intéressent pas à moi. Mais vivre punk, c'est me savoir à la marge. C'est de regarder le monde qui m'entoure et décider de ne pas faire partie de tout. Vivre punk, c'est prendre le droit d'avoir le choix et assumer tous ses choix, jusqu'au bout.



Bon, j'ai mis un titre à cette chronique, c'est pas pour enfiler les préceptes philosophiques et les mouches en même temps, mais pour remettre sur ma platine le très bon ...And out come the wolves des trèèèèès bons Rancid.

Troisième album de la formation californienne, il marque un tournant musical qui s'avère crucial pour l'expansion populaire. Les deux premier, Rancid (1993) et Let's go (1994), sonnaient bruts et sauvages, hardcore et secs comme deux nerfs de bœuf assemblés en nunchaku .

Celui-ci laisse largement entrer les influences ska et rocksteady qui animent les compères Tim Armstrong (chant et balançoire à cordes) et Matt Freeman (basse et ventilateur) qui sont issus d'un Operation Ivy devenu culte en moins de deux ans. Le disque s'en retrouve plus respirable, moins saturé en testostérone, avec pourtant 19 titres en moins de 50 minutes. Ça branle pas non plus, hein, on n'est pas chez Genesis, là... Et cela n'empêche en rien les poils de pousser à l'écoute de la plupart des morceaux, genre le tout premier, Maxwell murder qui, en à peine 1.25min arrive à mettre en PLS n'importe quelle section rythmique !



Tout au long de la galette, on oscille entre up-tempo enlevé (merci à l'ami Lars Frederiksen d'être venu apporter ses influences streetpunk européennes) et brûlots ska-punk, empreints d'une grosse dose de Clash du meilleur cru. Longtemps considéré comme leur London Calling, les membres de Rancid n'ont jamais conçu d'album plus homogène et efficace. Ils joueront la plupart de ses titres plusieurs années durant.

Preuve que le classique existe même chez les crêteux.



Passés du label indé Lookout Records à un autre indé (Epitaph), ils évitent savamment la pluie de projectiles qu'ils auraient probablement reçue en pleine gueule s'ils avaient cédé aux sirènes des grosses boîtes de prod (ils signeront tout de même un contrat de distribution chez Warner en 2003, comme quoi ...).

Intelligents, intègres et diablement bon musiciens, les quatre de Berkeley s'affranchissent des codes auxquels on veut les affilier et vont se balader loin du punk hardcore qui les a vu naître.

Les textes, signés Armstrong ou Frederiksen, sont engagés, personnels et sans peur du jugement. Ici, pas de pose, mais du vécu et des cicatrices. La rue, les filles, l'amitié, la défonce et la défiance sont au rendez-vous.

La dépendance à l'alcool est, faut-il le rappeler, à l'origine-même du groupe. En effet, Freeman devait trouver à son pote une occupation pour que celui-ci ne glande pas toute la journée et pense à ouvrir le premier d'une longue série de flacons. Cette occupation se prolonge aujourd'hui, trente ans après ses débuts. Du coup, merci qui? Merci Matt!

Dans la cabine du studio, Brett Gurewitz (le patron d'Epitaph et maître des manettes sur presque tous leurs albums) est écarté pour ce projet au profit de Jerry Finn qui collabore entre autres avec Green Day et Pennywise, avant de signer quatre albums de Blink 182... un mec qui s'y connaît en pistes vocales et en harmonies.

Mais le punk à roulette n'est pas forcément de la partie dans ...And out come the wolves. Comme je disais plus haut, il est beaucoup plus européen que ses congénères et c'est ce qui le rend plus… défendable aux yeux des puristes de notre côté de l'Atlantique. Le mix met en avant la basse, c'est d’ailleurs le premier truc qui m'a fait accrocher au style du groupe. Du reste, la caisse claire du puissant et polyvalent Brett Reed est claquante et rappelle les productions typiques de la scène skate-punk californienne. Je pense notamment à Bad Religion, ou, pour les citer encore, les cousins Green Day (d'ailleurs, Billie Joe Armstrong devait logiquement prendre le poste de deuxième gratteux avant de se raviser, provoquant de fait l'arrivée de Lars... l'histoire est décidément une coquine).

Les pistes et les tubes s'enchaînent. Je mets au défi quiconque de ne pas remuer de la tronche en entendant Roots radical, Junkie man, Ruby Soho, Time Bomb... et je veux pas jouer les minettes, mais il y a une espèce de sensualité dans la voix chargée de tonton Tim, un velouté qui n'est pas dû à la soupe Knorr, loin s'en faut... Le jeu de questions/réponses entre les deux brailleurs est un élément dynamique qui m'a complètement emballé lors mes premiers skanks en Dr Marten's.



On reconnaît le son de Rancid à deux trucs : la basse épileptique de Freeman et le gargouillis de compère Tim, probablement issu d'un croisement entre Tom Waits et une courroie de distribution en fin de vie.


Bref, je bavarde, je bavarde, mais ce putain d'album m'a accompagné durant des années avant de débander bêtement dans l'autoradio de ma Citroën Visa. C'est ainsi que THE cassette intitulée « Rancid», que m'avait prêté pour une durée, disons... indéterminée mon frère d'armes Jimmy, a fini sa carrière dans un caniveau entre Agen et Villeneuve sur Lot. Ce sont les rats qui ont dû s'en mettre plein la musette.

Un pogo dans les égouts, voilà un bon titre de bouquin qui démarrerait comme ça...

Quant à moi, j'en ai pris pour vingt piges et plus. Merci, Jim. Je te dois une cassette.

 
 
 

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